02.10.2020

"Souvenirs d’enfance" : Axel Hubler décrit le Cole Bay d'il y a 40 ans

Soualigapost.com publie les souvenirs d’enfance d’Axel Hubler. Il nous raconte des histoires dans lesquelles il décrit Saint-Martin

Une photo qui me ramène plus de quarante ans en arrière... Nous apercevons les dernières plaines de Cole Bay. Avec au fond, dans ses ultimes années de quiétude, le village de Simpson bay si authentique. La montagne Billy Foly vierge de toute construction.

En ces temps là, faire le tour de l'île, calmement et en s'arrêtant dans les lieux pittoresques, nécessitait entre deux et trois heures. Cette prise de vue, montre les plaines davantage arides que celles qui les précèdent, c'est-à-dire celles jouxtant la frontière. Si bien sur ces dernières l'élevage bovin y était courant, dans cette section plus sèche, plus aride il s'agissait davantage d'élevage caprin. Chose courante était de devoir ralentir pour laisser passer les troupeaux de cabris qui gambadaient librement sur la voie car une grande partie des terrains n'avait pas de clôture.

Des petites cases en bois, aux scènes classiquement antillaises, ponctuaient de ci, de là les derniers espaces sauvages. Des coqs et des poules autour des habitations, des pintades, des chiens, le linge flottant au vent pour sécher. Quelques potagers et surtout des épineux, des calebassiers, plus rarement un manguier ou un tamarinier, venaient finir l'aspect savane africaine du lieu.

Un détail me revient à l'esprit : pendant la plus grande partie du trajet, la route longeait le lagon. Un léger coup de volant, et la voiture terminait dans l'eau. Lors du passage de celle ci, les crabes apeurés couraient dans tous les sens et disparaissent dans leurs petits trous domiciliaires. A l'époque les véhicules n'avaient pas de climatisation et donc, cette odeur particulière d'air salin et pur envahissait nos poumons.

Il suffit de regarder en détail la photo pour constater que l'isthme ou se trouve aujourd'hui la marina " Isle de Sol " n'est qu'un atoll sablonneux et que, la frange de Simpson bay est intacte. Pour nous rendre à l'aéroport, nous avions le choix de passer par le village où l'on faisait emplettes de poisson frais ou bien toujours en longeant le lagon. Il y avait un vieux pont métallique. Sa table était constituée de lourdes planches en bois espacées. Bien des années plus tard, lorsque j'y passais à moto, il fallait faire très attention car les roues s'immisçant dans les rainures, la conduite devenait périlleuse !

Quelques mètres de plus et il y avait quantité d'étals en bois : les pêcheurs. Arrivant avec leurs saintoises par le lagon, ils les hissaient sur le sable et vendaient directement leur marchandise aux passants. Un souvenir m'émerveillait, celui du pêcheur lançant en l'air un viscère et les mouettes l'attrapant en plein vol ! A leurs pieds, des monticules de coquilles de lambi. Ils faisaient un trou sur le côté et tiraient l'animal qui " glissait " vers l'extérieur. Poissons et mollusques étaient enveloppés dans du papier journal.

La piste de l'aéroport était plus courte que celle d'aujourd'hui. L' aéroport a été remanié et agrandi à plusieurs reprises depuis. Son plan était différent mais je me souviens qu'il fallait traverser la route pour gagner le parking. Gratuit et en terre, ombragé par les raisiniers de mer. En saison, nous arrachions une feuille de cet arbre et la roulions en cornet, de façon à le remplir de ces raisins au mauve profond tacheté, si sucrés qu'en pressant certains, on voyait la petite goutte, tel du miel, paraître. Aujourd'hui les derniers raisiniers du coin, sont visibles entourant le restaurant " Karakter ". Au début des années 80 le parking sera goudronné. Comme cela amusait les visiteurs de voir un âne y gambader librement, ou une poule endormie perchée sur le toit de votre voiture attendant votre retour ! Je revois la salle d'arrivée, ouverte, juste séparée par une sorte de muret en bois ou les gens s'accoudaient en attendant. Au mur, un trou par lequel on plaçait les bagages sur les deux courroies de distribution faisant un vacarme d'enfer. Au plafond, des ventilateurs rouillés, tournant à vive allure, brassant de l'air chaud. Deux comptoirs sans vitre, ou étaient présents les officiers d'immigration. Habituellement il n'y en avait qu'un d'ouvert. Il n'y avait pas d'attente, la sortie était rapide. Il y avait si peu de monde... Welcome to Saint Martin, vous êtes arrivés ! Saint-Martin Antilles Françaises/Néerlandaises. 1979.

(texte et photo : Axel Hubler)

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