11.07.2017

"Il ne faut pas prendre l’audience pénale pour La Française des Jeux"

Deux femmes, voisines, sont accusées de violences réciproques mais seule une sera condamnée par le tribunal correctionnel ainsi que son fils.

Madame C., native d’Haïti, demande 50 000 euros de dommages et intérêts à sa voisine, d’origine haïtienne également, Mademoiselle H., qu’elle accuse de l’avoir frappée. Les faits remontent à janvier 2015. Un jour de la semaine, Madame C., 61 ans, explique qu’elle sort ses poubelles dans la cour de l’immeuble lorsque sa jeune voisine, 29 ans, arrive et la roue de coups avec un bâton. Elle se rend ensuite chez le médecin, obtient un certificat médical attestant des hématomes et «un choc psychologique», une ITT de huit jours puis va à la gendarmerie déposer plainte.

La voisine est alors entendue par les enquêteurs mais elle nie les faits et affirme le contraire. C’est elle qui aurait été victime de violences de la part de Madame C. quelques jours plus tôt. «Je continuerai jusqu’à ce que je te casse les dents», aurait-elle dit à Mademoiselle H. Quoi qu’il en soit les deux femmes sont poursuivies pour violences avec arme et convoquées devant le tribunal correctionnel de Saint-Martin début juin 2017.

À la barre, Madame C. n’en démord pas : elle est persécutée par Mademoiselle H. Elle prétend que sa voisine «dit des choses sur elle», qu’elle lui a déchiré des courriers. Elle se dit être la victime. Elle a même apporté des radios afin de prouver aux magistrats la violence des coups reçus. Elle assure être aujourd’hui «handicapée» et «ne plus pouvoir lever le bras droit». C’est pourquoi elle demande 50 000 euros de dommages et intérêts.

«Il ne faut tout de même pas prendre l’audience pénale pour La Française des Jeux», a commenté le parquet qui a «de forts doutes» quant aux faits survenus dans la cour.

«Madame C. dit avoir été blessée de manière très importante mais elle était quand même état pour aller chez sa voisine le dimanche. Si j’estime être victime de mon voisin, je n’attends pas trois jours pour aller demander des explications, j’y vais tout de suite», a-t-il déclaré.

Le dimanche qui a suivi la soi-disant altercation dans la cour, Madame C. est en effet allée rendre visite à sa voisine. «C’était avant d’aller à la messe», précise-t-elle aux juges. Et elle y est allée accompagnée de son fils, CR. La voisine n’a pas voulu ouvrir. La tension est rapidement montée et le fils a défoncé la porte ce qui l’a valu d’être aussi poursuivi et convoqué devant la justice. «Elle avait une machette à la main», se justifie-t-il. «Et pour cause, vous veniez de défoncer sa porte», rétorque le magistrat.

Si à l’altercation dans la cour aucune autre personne de l’immeuble n’avait assisté, ce dimanche matin, plusieurs témoins confirment la scène de violence. Le fils l’admet aussi. «C’était pour défendre ma mère. Après la bagarre dans la cour, elle était vraiment mal. C’est ma mère, je ferai tout pour elle», dit-il. Il trouve ainsi «injuste de vouloir [leur] faire porter le chapeau ». «C’est tout à fait normal pour un fils de vouloir défendre sa mère mais le problème est que vous racontez des faits auxquels vous n’avez pas assisté», lui fait remarquer à plusieurs reprises le juge.

Le jugement a été rendu un mois plus tard, le 6 juillet. Le tribunal a relaxé la voisine des faits de violences mais a condamné la mère et le fils à des peines de deux et un mois de prison avec sursis.

Estelle Gasnet