16.10.2018

Réseau d’eau à la Baie orientale : les travaux de réfection sont bien du ressort de l’ASL

C'est-à-dire à la charge des résidents car le réseau est considéré comme privé et non public.

La cour administrative d'appel de Bordeaux saisie par l'ASL des Résidences de la Baie orientale a donné raison à la COM qui a obligé en 2015 l'ASL à faire des travaux de réfection des réseaux d'eau potable et d'assainissement.

Le litige

En 2012, la Générale des Eaux constate de nombreuses et importantes fuites sur le réseau d’eau potable des Résidences de la Baie orientale gérées par une ASL (association syndicale libre) du même nom. Elles sont telles que la GDE prend la décision en 2013 de couper la distribution de l’eau dans le lotissement. Ce qui ne manque pas de faire un tollé général.

La GDE ne veut plus alimenter le secteur tant que l’ASL ne réalise pas des travaux de réfection des réseaux. Or, cette dernière considère qu’il ne lui appartient pas de les faire; ils sont, selon elle, du ressort de la GDE.

Le litige est réglé provisoirement : les fuites sont colmatées mais le fond du problème demeure. Les canalisations qui transportent l’eau potable à la Baie orientale doivent impérativement faire l’objet de réparations et de rénovations.

La présidente de la Collectivité, Aline Hanson notifie alors en juin 2015 à l’ASL une mise en demeure «d’assurer, par tout moyen, la résorption des atteintes à la sûreté, à la sécurité et la salubrité publiques causés par ses réseaux d’eau potable et d’assainissement défaillants dans un délai de trois mois et de justifier auprès de la collectivité des démarches engagées à cette fin».

L’ASL conteste cet arrêté en saisissant le tribunal administratif qui, en juin 2016, donnera raison à la COM. En octobre de la même année, l’ASL fait appel du jugement. La cour administrative d’appel de Bordeaux a été saisie du dossier. Elle l’a examiné en audience publique le 24 septembre dernier et a rendu sa décision le 8 octobre, décision à nouveau favorable à la COM.

Un enjeu à près de 2 millions d’euros

L’enjeu de la décision de la justice est énorme financièrement. En effet, les réseaux sont en très mauvais état et il est urgent de les rénover. La GDE a estimé en 2015 à plus de 1,7 million d’euros le coût des travaux.

Et c’est en statuant sur la légalité et le bien fondé de l’arrêté de la COM, que la justice confirmera le propriétaire desdits réseaux, à qu’il appartient de réaliser et de payer ces travaux. C’est pourquoi l’ASL se bat pour faire admettre sa version, que les réseaux sont publics et non privés.

Comment le propriétaire d’un réseau est-il identifié ?

Selon la loi est public le réseau qui part de l’usine de production et qui va à l’entrée d’une résidence, d’un immeuble (il est sur la voie publique). A l’entrée du lotissement, de la résidence, de l’immeuble où arrive le réseau public, est posé un compteur général. De celui-ci part un second réseau qui alimente les maisons, ce réseau est privé et appartient au lotissement/résidence.

En ce qui concerne les Résidences de la Baie orientale, selon les éléments dont la justice a eus en sa possession, il est établi que «les réseaux d'eau potable et d'assainissement situés sous les voiries desservant les maisons individuelles et immeubles d'habitation dans le périmètre du lotissement privé Les Résidences de la Baie orientale ont été installés par plusieurs entreprises de travaux, mandatées par les lotisseurs privés successifs au cours des décennies 1980 et 1990». La commune, à l’époque, n’est intervenue dans ces opérations qu’au travers de la délivrance d’autorisations (arrêtés de lotir et permis de construire). Ces faits ne sont contestés ni par l’ASL, ni par la COM.

La cour administrative d’appel de Bordeaux note par ailleurs que «l’ASL n’établit pas que la commune de Saint-Martin, aurait décidé de prendre en charge ces travaux de mise en place des réseaux du lotissement ou accompli en fait, dans les ouvrages en cause, des travaux à des fins d'intérêt général». «Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la propriété de ces équipements communs situés dans le périmètre du lotissement aurait été transférée, d'une part, dans le domaine de la collectivité territoriale par le biais de conventions conclues avec les lotisseurs successifs une fois les travaux achevés, ou même avec l'association syndicale libre ni, d'autre part, au profit de la société Générale des Eaux Guadeloupe lorsque la commune de Saint-Martin a entrepris de lui déléguer, par contrat du 23 mars 2006, l'exploitation de son service public d'eau potable», poursuite la cour d’appel.

Le compteur général, installé tardivement, change-t-il la donne ?

Si sur le principe expliqué ci-dessus, l’ASL est d’accord, elle dénonce en revanche une opération de la GDE pour modifier ses responsabilités un an après avoir commencé à constater les fuites ; cette opération étant «l’installation sauvage sans autorisation et en dépit de l’opposition de l’ASL, d’un compteur général à l’entrée de la résidence au mois de mai 2013».

L’ASL soutient qu’avant cette installation, le réseau dans le périmètre du lotissement était public et que la GDE a mis ce compteur pour faire remonter la limite des réseaux privé/public à sa faveur et ainsi «fuir ses responsabilités et faire peser la charge de l’entretien du réseau sur les résidents de l’ASL».

La cour administrative d’appel de Bordeaux ne partage pas la même interprétation au sujet de l’installation du compteur général. Selon elle, la GDE était tenue de le faire pour «mettre en conformité le lotissement avec le règlement de l’eau». La cour considère donc que cette installation «n’est pas de nature à avoir modifié la nature privée des réseaux litigieux» et campe sur sa position, les réseaux après le compteur appartiennent à l’ASL.

Pour l’ASL, la COM a fait une «tentative de passage en force »

Dans cette affaire, l’ASL est opposée à la collectivité et non à la GDE. C’est l’arrêté de la COM l’obligeant à faire les travaux, qu’elle tente de faire annuler par voie judiciaire. Elle prétend ne jamais s’être «opposée à la réalisation des travaux mais au fait que l’arrêté [de la COM] l’expose à être considérée comme l’auteur d’infractions».

«La Collectivité s'est curieusement précipitée pour trancher sur une question techniquement compliquée, faisant alors l'objet d'une expertise judiciaire à laquelle elle a été attraite et qui n'a pas encore donné lieu au rapport de l'expert», commente celle pour qui «il est évident que l'arrêté contesté ne constitue, ni plus ni moins, qu'une tentative " de passage en force ", résultant de la crainte de la collectivité d'être, in fine, débitrice de l'obligation d'entretien et de réfection du réseau de la Baie orientale».

Pour l’ASL, la COM aurait pu prescrire des mesures de sûreté et leur exécution à ses frais, si celle-ci estimait en effet que le danger de ne pas effectuer les réfections des réseaux était réel pour la zone, voire pour le territoire.

En termes de santé d’une part. En effet, la COM s’est basée sur un constat d’huissier établi à la demande de l’ASL, pour faire valoir que «l’ampleur des fuites» avait pour conséquence des «odeurs d'égout, une stagnation d'une eau malodorante comportant des morceaux de papier toilette et d'excréments» et que ceci était à «l'origine d'atteintes à la sûreté, la commodité du passage et à la propreté des voies internes et de risques de propagation de maladies telles que le chikungunya ».

En termes de sécurité pour le territoire d’autre part. La COM a relevé que «les débits de perte en eau potable» pouvaient aussi avoir pour conséquence une «rupture de production», qu’ils faisaient «courir à l'usine de désalinisation qui fonctionne à plein régime et constitue l'unique source d'approvisionnement en eau potable de toute la collectivité de Saint-Martin».

Dans ces conditions, l’ASL considère que la COM pouvait très bien faire exécuter les travaux d’urgence à ses frais. Ce à quoi la cour d’appel répond : «sur ce fondement, cette autorité peut légalement, afin d'assurer la sécurité et la salubrité publiques, enjoindre aux propriétaires de biens immobiliers ou une association de propriétaires de réaliser les travaux requis à cet effet, alors même qu'elle dispose du pouvoir de prescrire aux frais de la collectivité l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances».

Au final, la présidente de la COM n’a pas «entaché l’arrêté contesté d’erreur de droit ou d’appréciation, di davantage de détournement de pouvoir ». Aussi la cour administrative d’appel de Bordeaux a-t-elle rejeté la demande de l’ASL de faire annuler l’arrêté.

Estelle Gasnet
3 commentaires

Commentaires

Eh bien, ceux qui paient déjà tout pour ceux qui ne paient rien devront encore payer pour eux même.
Attention, tant va la cruche à l'eau...
La décision est d'autant plus incompréhensible que nous avons tous un compteur privé et un abonnement mensuel alors que cette décision laisserait penser que l'ASL cotise une fois pour tous.

Le lotissement est privé dont aux colotis de réparer et payer. Mais ils sont aussi en droit de fermer l'accès motorisé à la plage.

GDEG ET COM GAGNANTS # 2

Seconde manche mais normalement le Conseil d'Etat n'est pas le dernier à dire le contraire de ce que dit la Cour d'Appel de Bordeaux et ce à de nombreuses reprises.

La remarque précédente est fort juste, puisque selon le cahier des charges, le compteur est la limite du privé et du public.

Le plus amusant là dedans c'est que si les tuyaux sont cassés c'est pour trois motifs principaux, l'accès de tout ce qui roule à la BO sur une chaussée par forcément adaptée, la chaleur intense
mais et surtout la qualité de l'eau produite durant des années qui a détruit et détruit encore les tuyaux d'adduction utilisés dans les réseaux d'eau souterrains.

Et le pire dans tout cela c'est que ce sont ces gros voyous de la GDEG qui sont à l'origine de tout cela car ce sont eux qui ont posé pratiquement tous les réseaux de la BO et de SXM french side et qui désormais font les chochottes quant il s'agit de réparer.

Un conseil à la moindre fuite sur un réseau de moins de dix ans n'hésitez surtout pas faites jouer la décennale de l'entreprise qui a posé les réseaux. Vous verrez à force le matériel utilisé sera de qualité et avec un peu de chance l'organisme qui fournit l'eau sera poursuivi à son tour pour la qualité de l'eau produite.

En attendant, la suite à la prochaine étape; celle du Conseil d'Etat. Ce serait dommage de ne pas aller au bout.