11.12.2023

Gendarme blessé : l'auteur des faits condamné à deux ans de prison ferme

Dans la soirée de mardi 5 décembre, un gendarme a été sérieusement blessé, après avoir été percuté par un deux-roues à Sandy Ground. Le pilote de l’engin a pris la fuite et s’est présenté de lui-même à la gendarmerie le lendemain matin. Il a été placé en garde-à-vue. Une enquête pour tentative d’homicide sur personne dépositaire de l’autorité publique avait été qualifiée.

Vendredi matin, J.B était jugé en comparution immédiate par le tribunal correctionnel de Saint-Martin. Cependant, les faits ont été requalifiés en «violence sur un militaire de la gendarmerie nationale suivie d’incapacité supérieure à huit jours aggravée». Il lui est également reproché le délit de fuite, la conduite d’un véhicule sans assurance et la mise en danger d’autrui.

Aux alentours de 20h, les gendarmes ont mené une opération comités opérationnels départementaux anti-fraude (CODAF), sur le secteur de Sandy Ground. Dans ce cadre, une déviation a été mise en place sur la voie publique. «Un scooter est arrivé et n’a pas respecté cette déviation. Il a heurté un gendarme», indiquait Xavier Sicot, procureur de la République.

«Je ne voulais pas faire ça au gendarme», affirme J.B lors de l’audience. Concernant le délit de fuite, J.B explique avoir entendu les gendarmes vouloir lui tirer dessus. Pourtant, «sur les vidéos à aucun moment nous entendons ça», lui adresse la juge. Puis, il indiquera que quelques instants avant les faits, on aurait essayé de l’agresser pour lui voler son scooter.

«Lorsque vous avez percuté l’officier, sur les bandes de vidéos nous entendons ses collèges crier qu’il est blessé. Vous êtes donc reparti sur votre scooter en sachant que vous aviez blessé un gendarme ? », interroge la juge. « Je ne savais pas qu’il était blessé », répond J.B. S’il est conscient «de la gravité des choses », il souhaite « réparer ses erreurs de n’importe qu’elle manière qu’elle soit», confie-t-il dans le box des accusés.

Selon le ministère public, les faits sont «extrêmement graves et inacceptables» d’autant qu’ils ont été commis dans le cadre d’une activité professionnelle et avec des circonstances corporelles «graves» sur la victime. Le gendarme «présentait des blessures aux membres inférieurs, des fractures, et a dû être opéré », indique le procureur de Basse-Terre. Si l’intention des faits sur homicide involontaire n’a pas pu être déterminée, cela n’était pas «déraisonnable de l’acte commis», convient le vice-procureur.

D’autant que pour le parquet, les explications du prévenu n’ont aucun crédit et ne permettent pas d’apporter des réponses concrètes pour le confronter à ses gestes. «Il faudrait le croire sur ses bonnes paroles», déclare le vice-procureur. «De mon point de vue, il a accéléré pour se soustraire. Sur les vidéos, nous voyons tous les conducteurs ralentir car ils voient que c’est une déviation mise en place par des gendarmes visibles. De plus, lorsque le prévenu s’approche de cette déviation il freine, il peut donc identifier les gendarmes suffisamment nombreux, mais non. Sa volonté était de passer en force et de percuter le gendarme», affirme le vice-procureur.

«Nous sommes sur un phénomène sur l’île, où ces chauffeurs en deux-roues adoptent un comportement assumé, quasi revendiqué avec cette intention de vouloir défier les forces de l’ordre et c’est intolérable», insiste-t-il.

En ce sens, le ministère public souhaite «fermement» entrer en voie de condamnation. Ainsi, il requiert une peine de deux ans de prison avec mandat de dépôt compte tenu de la gravité des faits corporels sur la victime. Ainsi que la confiscation du scooter à titre de peine complémentaire. En outre, J.B porte une condamnation à son casier judiciaire pour usage illicite de stupéfiant datant de 2019.

Lors de la plaidoirie de la défense, le contexte décrit par son client, avoir commis ces actes sont probables quand il dit que l’on a essayé de lui soustraire son scooter à deux reprises pendant cette soirée.

«Certes sur les vidéos nous voyons que la route est éclairée mais les gendarmes ne portaient pas de gilet jaune, il n’y avait pas de gyrophare, etc. De loin, quand on arrive à forte vitesse comme mon client, on peut croire que ce sont des individus autres que des gendarmes», pose l’avocate. «Bien que dans tous les cas, nous ne devons pas foncer sur qui ce soit, mais je veux bien entendre que mon client a été agressé deux fois, qu’il a grandi à Saint-Martin avec cette idée qu’il existe des carjackings à ce passage-là», poursuit-elle.

Selon l’avocate, il y a un fait important dans l’attitude de J.B. «Il a fait le choix de se présenter de lui-même pour assumer ses actes. La première chose qu’il m’a dite lors de notre entretien est que quoi qu’il dise, rien ne pourra excuser ce qu’il a fait. Il a compris la gravité des faits et les regrette. Il veut réparer ses erreurs», considère la défense.

Sur les réquisitions du parquet, compte tenu d’une seule mention au casier judiciaire de J.P et de «sa situation personnelle avec un enfant qui va naître», elle demande au tribunal un an de prison aménageable. Ayant la parole en dernier, le prévenu s’excuse de son attitude.

Après délibération, le tribunal déclare J.B coupable de l’intégralité des faits qui lui sont reprochés et le condamne à deux ans de prison. Il lui décerne un mandat de dépôt pour assurer l’exécution de la peine. Le tribunal a considéré que les déclarations du prévenu ne sont pas crédibles au vu des circonstances dans lesquelles ils ont été commis. « Sachant qu’il y avait plusieurs gendarmes, qu’ils avaient des lampes et les autres usagers avaient parfaitement compris qu’il s’agissait d’un contrôle avec une déviation», explique la juge. « Vous avez volontairement percuté un gendarme. On ne peut pas délibérément se comporter ainsi », conclut la juge.

Le tribunal reçoit la constitution de la partie civil et renvoie l’affaire sur intérêt civil au 16 avril 2024. Le prévenu a 10 jours pour faire appel.

Siya TOURE